Énergies renouvelables: Le modèle allemand à bout de souffle

par Lucas Léger
le 28 septembre 2014





Le sommet sur le climat, qui a eu lieu la semaine dernière au siège des Nations Unies à New York, ravive le débat sur le changement climatique, et aussi les peurs qui en découlent.



« Changer de modèle » de production et de consommation énergétique, voilà le mot d’ordre. Le défi est de savoir comment. À ce titre, l’Allemagne est un bon exemple, puisqu’elle a fait le choix de développer les énergies renouvelables dans son mix énergétique. Dans quelle mesure cette stratégie est-elle payante ?


Par rapport à 1990, l’Allemagne a diminué ses émissions de gaz à effet de serre de 25 %,. C’est bien mieux que la France, qui les a réduites de 10 % sur la même période, alors que la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute est à peu près équivalente.


Mais il serait trop simpliste de mesurer l’efficacité de la politique énergétique par ce seul critère, car une autre tendance, plus inquiétante se dessine. D’une part, l’émergence du photovoltaïque et de l’éolien repose en grande partie sur la volonté de l’État allemand de favoriser ces énergies, ce qui a un coût non négligeable pour le consommateur. D’autre part, l’Allemagne est l’un des rares pays à avoir, depuis quelques années, augmenté sa consommation de charbon, dont l’impact sur l’environnement est l’un des plus nocifs parmi les énergies fossiles. Le charbon compte aujourd’hui pour 45 % de la production allemande d’électricité. Et sa consommation de lignite, anthracite et houille, tous des charbons très concentrés en carbone, représente 42, 35 et 54 % respectivement de la consommation intérieure brute de l’Union européenne.


La politique énergétique de l’Allemagne est donc en pleine contradiction, notamment avec les objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre définis par l’Union européenne. Il y a principalement deux variables qui font pression à la baisse des émissions de gaz à effet de serre. La première est bien évidemment la politique énergétique. La seconde dépend de l’état du marché des énergies fossiles : si les prix sont à la baisse, il y aura moins d’incitations pour les entreprises innovantes à trouver des énergies substituables. L’effet est renforcé quand un nouvel acteur sur le marché fait augmenter les volumes ; c’est le cas notamment des États-Unis depuis quelques années avec l’exploitation de nouveaux gisements de gaz et huile de schistes.


Par ailleurs, le modèle allemand s’essouffle. L’un des plus gros chantiers d’éolien en mer (Bard 1) ne sera pas fonctionnel avant des années tant les problèmes techniques sont nombreux. Pour le moment, les autorités font tourner les turbines au fioul pour éviter l’usure causée par l’eau de mer ! Certains investisseurs commencent à jeter l’éponge. Dans un récent sondage de la Chambre de commerce américaine, les entrepreneurs américains trouvent l’Allemagne moins attractive, à cause de ces choix en matière de politique énergétique. C’est le cas aussi de certaines entreprises allemandes, qui préfèrent investir à l’étranger. Tout cela à un coût, notamment en termes d’emplois et de croissance. Alors que l’Allemagne est le moteur économique de l’Europe, elle devra peut-être revoir certains de ses objectifs si elle ne veut pas pénaliser toute l’Europe.


L’augmentation rapide des énergies renouvelables n’a profité ni à l’industrie, ni aux ménages. Dans les deux cas, le coût de l’énergie est bien plus élevé en Allemagne qu’en France, au Royaume-Uni ou aux États-Unis. La situation est d’autant plus contrastée avec ces derniers, qui, grâce à l’exploitation des gaz et huile de schistes ont vu les prix de l’énergie diminuer sensiblement pour les ménages et les entreprises. Cela montre d’abord l’importance des choix politiques en matière d’énergie. C’est particulièrement le cas dans le secteur industriel.



Alors que les entreprises américaines sont de plus en plus compétitives, y compris vis-à-vis de leurs concurrents chinois, les entreprises allemandes voient leur facture d’électricité s’accroitre. Cette situation est préoccupante, car l’industrie lourde, comme la chimie, est touchée de plein fouet par la hausse des prix. Et ce ne sont pas seulement les grands groupes qui s’inquiètent ; les PME se disent de plus en plus préoccupée par le coût de l’énergie, qui pourrait avoir des effets délétères sur leurs exportations.


Ensuite, si les prix des hydrocarbures stagnent à cause du développement des gaz et huile non conventionnels aux Etats-Unis, il sera plus difficile pour l’Allemagne d’avoir un secteur des renouvelables compétitif. Une partie de la réussite allemande reposait sur le fait que le prix des énergies fossiles allait exploser. Si l’exploitation des gaz de schiste repousse cette perspective de 20 ou 30 ans, il sera compliquer de faire un virage à 180 degrés.

Institut de Recherches Économiques et Fiscales (IRS) http://fr.irefeurope.org






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