La France a détruit l'équivalent de 7 départements en trente ans

Par Michel Feltin-Palas , publié le 15/04/2015

Une étude de l'Insee montre l'évolution du territoire sur trois décennies. La place prise par les villes a des conséquences directes sur l'équilibre générale de la France.



Après la refonte du paysage régional, la polémique devrait continuer: Le gouvernement désignera, sans doute le 22 avril, les nouvelles préfectures de région.
Mohammed Zemri/L'Express


La France détruit son territoire à vitesse grand V. C'est ce que l'on apprend à la lecture d'une enquête consacrée à l'évolution des villes depuis trente ans publiée ce mercredi par l'Insee.


Les chiffres, parfois, sont terribles. Entre 1982 et 1991, la population des villes s'est accrue de 23%, en gagnant près de 9 millions d'habitants supplémentaires. Le problème est que l'espace urbain a, lui, augmenté beaucoup plus rapidement: Il a gagné... 42%, en passant de 84 000 km² à 119 000 km². Dit comme cela, évidemment, cela peut laisser de marbre. Tout change quand on sait que ces 35 000 km² perdus correspondent à l'équivalent de... sept départements français. C'est comme si, en l'espace d'une génération, nous avons collectivement bétonné l'équivalent de l'Ariège, de la Haute-Loire, du Jura, des Bouches-du-Rhône, de la Lozère, de la Mayenne et du Lot, sans y laisser le moindre centimètre carré de bois ou de terre agricole ! 

 

Bienvenue près des rocades et des zones dactivité commerciales


Les causes de ce phénomène sont connues. Depuis les années 1970, les Français cherchent à fuir les grands ensembles. Un mouvement encouragé par l'Etat, qui a mis en place des aides à la maison individuelle tandis que le déclin de l'agriculture encourage les élus ruraux, pour sauver leur école et leur bureau de poste, à accueillir les populations et les entreprises à la recherche de terrains disponibles. Résultat : "L'urbanisme s'effectue pour l'essentiel sous forme d'étalement urbain, avec des lotissements, des rocades, des espaces commerciaux, des zones d'activité économique conçus sans l'intervention d'architecte ni d'urbaniste", rappelle l'urbaniste David Mangin.

Il ne s'agit donc pas de condamner les Français. Après tout, des enfants heureux au grand air, des parents épanouis dans leur pavillon, des bourgs ruraux qui se repeuplent: tout cela revêt des aspects positif. Il s'agit simplement de prendre conscience que cette addition de bonheurs individuels ne correspond pas forcément à l'intérêt général. Car ce mouvement de société a sa face sombre: destruction d'espaces fragiles, diminution de la biodiversité, imperméabilisation des sols et augmentation du risque d'inondation, dégradation des paysages... Pour ne rien arranger, ces implantations en périphérie se traduisent inévitablement par une explosion des déplacements en voiture, seul moyen de transport efficace en zone rurale. Avec la pollution, les accidents et les bouchons que cela suppose. Nous ne pourrons pas continuer longtemps ainsi. A ce rythme, en effet, l'ensemble du territoire métropolitain sera couvert de béton en moins de 4 siècles. Voulons-nous reproduire, à l'échelle du pays tout entier, l'énorme gâchis de la Côte d'Azur ? 



Une solution au vilain nom de densification


Bref, il est temps de changer de logiciel. La solution, au demeurant, existe. Elle porte hélas le vilain nom de densification ce qui, dans l'imaginaire collectif, renvoie inévitablement aux cités des années 1960 et 1970, synonymes de mal-vivre et de ghettoïsation. Autrement dit à un contre-modèle absolu. Fort heureusement, on sait aujourd'hui densifier intelligemment. "À Rotterdam, on construit des maisons individuelles accolées les unes aux autres, avec des toits-terrasses: chacune possède un jardin sur son toit! C'est-à-dire qu'en plein centre d'une grande métropole, on parvient à recréer un mode de vie quasi identique à celui que les gens vont chercher en grande banlieue", cite par exemple l'urbaniste Alain Cluzet.

En France aussi, de plus en plus d'élus cherchent à construire autrement, de manière plus dense, en concentrant les logements le long des axes de transports en commun, par exemple, comme à Bordeaux. D'autres s'efforcent de préserver une "ceinture verte" autour de la ville, comme à Rennes.

Bref, une prise de conscience est amorcée. Et de premières réalisations concrètes sont engagées. Compte tenu de l'ampleur du problème, il en faudra bien d'autres...

(1) Insee, la France et ses territoires. Fiche 2: La hiérarchie des villes en France métropolitaine sur trente ans: Stabilité globale et reclassements


Commentaire: 
  • «Bienvenue près des rocades et des zones d'activités commerciales» et... Des éoliennes.
  • «...De plus en plus d'élus cherchent à construire autrement...» Les cités urbaines se mettent «au vert», l'espace rural se met «au béton».
Bonne nuit et bonne chance


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