Les promesses en l'air s'accumulent pour l'aide au développement

EurActiv.fr 
Cécile Barbière



[Shutterstock/ giulio napolitano]

La concrétisation des promesses d’aide financière aux pays du Sud n’apparait pas dans le projet de loi de finances 2016, qui doit être définitivement adopté le 16 décembre.

Âprement discutés à l’Assemblée nationale et au Sénat, les crédits de l'aide publique au développement (APD) pour 2016 sont loin de refléter les annonces faites par le gouvernement français.

Annonces à la pelle
Le président François Hollande a annoncé une augmentation de 4 milliards d'euros de l’APD d’ici à 2020, dont la moitié serait dédiée au climat. En plus de ces annonces, la France s’est engagée à 370 millions d’euros de dons supplémentaires, pour l’adaptation des pays les plus vulnérables.

La crise syrienne a également fait l’objet de promesses de financement. La situation se dégradant dans les camps de réfugiés situés dans les pays limitrophes (Jordanie, Liban, Turquie), la France s’est engagée à affecter 100 millions d’euros aux agences de l’ONU en charge du dossier (le programme alimentaire mondial et le Haut-commissariat aux réfugiés).



Grand écart
Et les annonces ne s’arrêtent pas là. 100 millions de plus devront être affectés à la lutte contre le virus Ebola. Sans parler de 2 milliards d'euros promis à l'Afrique lors d’une conférence des donateurs en juillet, pour l’électrification du continent…

Parmi ces annonces, un certain nombre seront honorées sous forme de prêts, une minorité sous forme de dons. Mais le vote du budget français pour 2016 montre peu de traces de cette multitude d’engagements.

Présenté début octobre, le budget prévoyait une baisse initiale de l’aide au développement de plus de 6%, soit 177 millions d’euros.

>>Lire : Oxfam: « Le budget 2016 contredit l’ambition française sur le développement»

Un recul que le gouvernement avait corrigé dès les premières discussions du PLF à l’Assemblée nationale en ajoutant notamment 50 millions d’euros destinés à la crise syrienne, et en augmentant l’affectation de la taxe sur les transactions financières au budget développement à 260 millions d'euros, soit une hausse de 100 millions d’euros par rapport à 2015.

Une opération qui devait permettre, au mieux, de stabiliser le budget « Il y a une grosse déception sur la réalité des crédits budgétaires consacrés au développement et au climat » regrette Christian Reboul d’Oxfam France.

>>Lire : La TTF à la rescousse de l’aide au développement

Contraintes budgétaires obligent, c’est finalement la taxe sur les transactions financières française qui est venue au secours du budget développement en déshérence.

Les députés ont adopté un nouvel élargissement de la contribution de la taxe sur les transactions financières à l’aide au développement, portant sa participation à 50% de ses recettes. Résultat, la TTF française devrait contribuer à hauteur de 528 millions d’euros.


Montagnes russes
« Mais le gouvernement s’est opposé à cet élargissement, et a fait passer un amendement retirant 162 millions d’euros de crédit du budget de l’aide au développement » dénonce Christian Reboul « Ce vote s’est déroulé en catimini grâce à une manœuvre du gouvernement et n’a été voté qu’en présence de 5 députés » rappelle le spécialiste.

>>Lire : L'élan des députés pour étendre la TTF plait modérément à Bercy

Sauvé d’une baisse nette, le budget de développement français va néanmoins difficilement pouvoir honorer l’ensemble des promesses françaises « Au final, seule l’augmentation de l’affectation de la TTF a permis d’avoir une petite hausse » explique Christian Reboul.


Perspectives 2017
Pour autant, les débats auront permis l’élargissement de la taxe sur les transactions financières aux opérations dites « intraday », qui consistent à acheter puis vendre des titres au cours de la même journée.

La taxation de ces opérations hautement spéculatives devrait faire grimper les recettes de la TTF française de 2 à 4 milliards d’euros, selon les estimations d’Oxfam. Pour Bercy, l’inclusion de ces opérations de trading pourrait rapporter un milliard d’euros par an supplémentaire.

La nouvelle assiette devrait en tout cas permettre de donner un coup d’accélérateur aux recettes jugées décevantes de la TTF. Si les estimations tablaient sur des recettes de 1,5 milliard d’euros en année pleine, la taxe sur les transactions financières a rapporté 700 millions d’euros en 2015 et devrait engranger 932,7 millions d’euros sur 2016.

La mise en œuvre de cette nouvelle assiette va intervenir à partir du 31 décembre 2016 « Résultat, il n’y aura aucun impact de cette décision sur le cycle budgétaire de cette année » explique Christian Reboul.

À partir de 2017, l’aide au développement pourrait bel et bien profiter de cette nouvelle manne, d'autant que le projet de TTF européenne, plus ambitieux en terme de montants récoltés, pourrait finir par voir le jour.

>>L'échec de la TTF douche les nouveaux espoirs de financement


CONTEXTE
Sous le coup d'une politique d'assainissement des finances publiques, la France a largement réduit le budget consacré à l'aide publique au développement, qui a diminué de plus de 20 % depuis 2012.

Face aux différentes échéances internationales de 2015, le président François Hollande a promis de consacrer des crédits supplémentaires à cette politique, ainsi qu'à la lutte contre le réchauffement climatique dans les pays pauvres.

Côté développement, en septembre 2015, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté les futurs Objectifs de développement durable (ODD), qui prendront la suite des 8 objectifs du millénaire pour le développement, un cadre international destiné à mobiliser les efforts de tous les pays pour rendre la planète durable et équitable avant 2030.

Côté climat, les 195 États membres des Nations unies doivent se retrouver à Paris en décembre afin de trouver un accord international visant à maintenir le réchauffement climatique sous la barre des 2 °C.



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